RPQ #2

Personnes trans autistes dans les discours médicaux : identités incompatibles?

Caroline Trottier-Gascon

Caroline Trottier-Gascon est une étudiante au doctorat en histoire à l’Université Concordia à Montréal. Elle prépare présentement un projet d’histoire orale avec les communautés trans montréalaises.

Cet article cherche à montrer comment certains discours médicaux rendent incompatibles les expériences trans et autistes[1], dont les théories cherchant à expliquer la cause de l’autisme ainsi que des expériences trans et des études de cas décrivant des personnes trans autistes. Ce texte s’inscrit dans la trajectoire des études récentes établissant un rapprochement entre handicap et parcours trans (Baril et Trevenen, 2014a, b; Baril, 2015). Dans le cadre de cet article, je m’intéresserai plus particulièrement à la manière dont interagissent les expériences trans et les expériences autistes selon le regard médical. Il est aussi important pour moi de souligner que les idées que j’expose dans ce texte ont été formées au contact des communautés trans de Montréal et du Québec, et que cet article puise à même notre bagage commun de connaissances – un bagage aussi fondamental qu’il est autrement invisible étant donné sa construction extra-académique et sa nature organique, collective et souvent orale.

Avant de voir ces discours et les invalidations qu’ils contiennent pour les personnes trans autistes, il importe de définir ces termes en tenant compte, d’une part, du discours médical, au cœur de cet article, mais aussi des discours militants des personnes concernées, c’est-à-dire les personnes autistes et les personnes trans respectivement.

Le DSM-5 identifie deux catégories de symptômes aux troubles du spectre de l’autisme : d’une part, des déficits persistants dans les habiletés sociales, touchant la communication verbale et non-verbale; d’autre part, des comportements répétitifs et des intérêts restreints (APA, 2013). Cette définition révisait celle du DSM-IV (APA, 1994), qui distinguait plusieurs catégories différentes (autisme, syndrome d’Asperger, trouble envahissant du développement non spécifié, etc.). L’Autism Self-Advocacy Network, similairement, donne une liste de sept traits principaux de l’autisme : des différences sensorielles, une approche différente à l’apprentissage et à la résolution de problèmes, des centres d’intérêts très concentrés, des mouvements atypiques et répétitifs, des difficultés avec la communication verbale et non-verbale, et des difficultés avec les interactions sociales (Autism Self-Advocacy Network, 2015). Tant dans les milieux médicaux que dans les milieux activistes, on utilise l’idée de spectre pour décrire comment chacun de ces traits peut être plus ou moins présent et plus ou moins handicapant d’une personne à l’autre. Bien que ces définitions des expériences autistes soient semblables, l’attitude face à l’autisme du corps médical et des militant-e-s autistes n’est nécessairement pas la même. Le premier, avec le soutien de certaines associations comme Autism Speaks, tend à voir l’autisme comme un problème devant être normalisé par l’imposition de comportements considérés comme acceptables, voire éliminés par la découverte d’une cure. Au contraire, certains milieux militant-e-s pour les droits autistes promeuvent plutôt l’idée de neurodiversité, affirmant que l’autisme est plus une variation normale de l’expérience humaine à valoriser qu’une pathologie à éliminer. L’idée de neurodiversité ne cherche pas à nier les difficultés que vivent les personnes autistes et neuroatypiques, mais plutôt à les expliquer par le fait que la société privilégie certains types d’expériences dites « neurotypiques » et que les attentes sociales, par conséquent, ne sont pas adaptées aux personnes autistes ou neuroatypiques. Ces deux visions calquent respectivement le modèle médical et le modèle social du handicap.

Cette distinction est aussi intéressante pour comprendre la divergence entre les différentes conceptions médicales et militantes des expériences trans. En fait, selon Alexandre Baril (2015, à paraître), l’opposition entre modèle médical et modèle social aide aussi à comprendre l’état des discours sur les personnes trans. Dans le DSM-5, les identités trans disposent d’une catégorie diagnostique, la dysphorie de genre (APA, 2013). Contrairement au trouble de l’identité de genre du DSM-IV (APA, 1994), que ce terme remplace, ou au transsexualisme du DSM-III (APA, 1980), la dysphorie de genre est définie en fonction de la souffrance vécue par une personne dont l’identité ne concorde pas avec son assignation de genre, et non en fonction de l’adéquation entre identité actuelle et assignation. Ce changement de définition est très récent, et n’a donc pas influencé tous les discours étudiés ici – en fait, une bonne partie de la littérature médicale récente utilisent le terme « transsexualisme », obsolète comme catégorie diagnostique depuis 1994, pour décrire le phénomène dans son ensemble. Pour certains milieux militants, le statut trans en général est défini par le fait de s’identifier à une catégorie de genre différente de celle qui a été assignée à la naissance. Comme parmi les militant-e-s autistes évoqués plus haut, ces activistes trans ne considèrent pas qu’être trans soit une maladie ou une pathologie, mais bien une expression de la diversité humaine.

En théorie (et en pratique), rien n’exclut qu’une personne soit trans et autiste en même temps. Néanmoins, plusieurs discours médicaux créent des obstacles à la reconnaissance de ces deux positions dans une seule personne, les rendant incompatibles. Dans un premier temps, je relèverai les contradictions et les manques des étiologies reposant sur l’hypothèse d’une variation hormonale in utero afin d’expliquer tant l’autisme que le « transsexualisme ». Ensuite, j’aborderai des études (principalement des études de cas) portant sur les personnes trans autistes afin d’évaluer comment elles invalident les expériences trans en les subordonnant aux traits autistes.

Avant de procéder plus avant, je tiens à préciser que ce travail est en bonne partie fondé sur une lecture critique de différents textes scientifiques. La presque totalité des articles scientifiques qui servent de matériel à ce travail ont été produits dans les deux dernières décennies et pathologisent les expériences trans et les expériences autistes. Les identités des personnes trans, en particulier, sont peu reconnues : la plupart des auteur-e-s utilisent systématiquement un genre grammatical qui ne correspond pas à l’identification apparente de la personne trans dont ils parlent. Je reviendrai plus loin sur les conséquences épistémiques de cette forme d’invalidation, mais je tiens néanmoins à spécifier que cet article pourrait évoquer des expériences difficiles, étant donné les discours stigmatisants qui seront présentés à la critique.

Étiologies incompatibles

Cette section confrontera deux champs d’études semblables mais séparés, les recherches de Simon Baron-Cohen et de ses collaborateurs-trices sur la théorie du cerveau masculin extrême comme explication de l’autisme et les recherches sur l’étiologie du « transsexualisme », en montrant en quoi ces théories qui essentialisent le genre sont incompatibles et ne permettent pas de rendre compte de l’expérience des personnes trans autistes.

D’après Simon Baron-Cohen (1997, 2002, 2005, 2009), à l’échelle de la population, le cerveau masculin est plus systématisant, c’est-à-dire plus apte à analyser les règles d’un système, et le cerveau féminin, plus empathisant, c’est-à-dire plus apte à identifier l’état mental des autres et à répondre avec l’émotion appropriée. Affirmant que les personnes autistes connaissent des déficits dans la fonction empathisante et disposent de capacités de systématisation supérieures à la moyenne, il conclut que les personnes autistes disposent d’un « cerveau masculin extrême », développant ainsi un instinct d’Hans Asperger (1944). Pour Baron-Cohen, l’autisme est entièrement biologique et s’explique par une différence dans la structure même du cerveau, provoquée notamment par des variations hormonales in utero, en l’occurrence un taux anormalement élevé de testostérone pendant la gestation.

À partir de l’hypothèse originale de 1997, Simon Baron-Cohen et ses collaborateurs-trices mèneront de nombreuses études cherchant à prouver que la testostérone prénatale est à l’origine de ces différences cognitives entre hommes, femmes et autistes. Ainsi, ils établiront des liens entre l’autisme et une série d’indicateurs liés avec la testostérone prénatale, dont le rapport entre l’index et l’annulaire (Manning et al., 2001), des différences dans l’anatomie du cerveau (Baron-Cohen, 2005; Chou et al., 2011), la plus grande prévalence de troubles liés à la testostérone parmi les femmes autistes (Ingudomnukul et al., 2007), la plus forte prévalence de traits autistes chez les femmes avec une hyperplasie congénitale des surrénales (Knickermeyer et al., 2006b), le lien entre des gènes associés à la testostérone et des traits autistes (Chakrabarti et al., 2009), et la corrélation entre les taux de testostérone prénataux dans le sac amniotique et des comportements liés à l’autisme (Auyeung et al., 2006, 2009; Chapman et al., 2006; Knickmeyer et al., 2005, 2006a; Lutchmaya et al., 2002a, b).

La théorie du cerveau masculin extrême doit être mise en relation avec les études sur les personnes trans, qui tentent d’expliquer l’existence de femmes trans par les mêmes facteurs : encore une fois, une structure cérébrale fémininisée ou androgyne, dont l’origine se trouve dans des variations hormonales in utero. Cette hypothèse a été lancée par un groupe de chercheur-e-s néerlandais qui avaient découverts que, chez les femmes trans, certaines structures dans le cerveau étaient plus similaires à celles des femmes que des hommes (Zhou et al., 1995; Kruijver et al., 2000). Elle a ensuite été approfondies par d’autres recherches du même type (récemment, Kranz et al., 2014). Dans une démarche qui rappelle celle de Simon Baron-Cohen et de ses collaborateurs-trices, plusieurs chercheur-e-s ont aussi cherché à attribuer les identités de genre trans aux androgènes prénataux sur la base des mêmes indicateurs : rapport entre la longueur de l’index et de l’annulaire (Schneider, Pickel et Stalla, 2006; Vujović et al., 2014), gènes associés à la testostérone (Bentz et al., 2008), etc. (Pour des revues plus systématiques de la production scientifique à ce sujet, voir Saraswat, Weinand et Safer, 2015, et Guillemon, Junque et Gomez-Gil, 2016.) Il est important de mentionner que plusieurs de ces études, notamment les plus récentes (Savic et Arver, 2011; Rametti et al., 2011; Simon et al., 2013; Kranz et al., 2014; Guillamon et al., 2016), commettent le choix d’exclure certaines personnes trans de leur échantillon en s’appuyant sur la typologie controversée de Ray Blanchard (1985, 1988, 1989a, b, 1991). Ce choix méthodologique risque fortement de mener à une sous-représentation des personnes autistes, dont une proportion significative ne sont pas hétérosexuel-le-s (Ingudomnukul et al., 2007; Jack 2012).

Toutefois, les recherches indiquant le lien le plus clair (mais loin d’être systématique) entre l’identité de genre et les hormones prénatales sont basées sur l’expérience de personnes intersexes (Veale, Clarke & Lomax, 2010; Berenbaum & Beltz, 2011; Saraswat, Weinand & Safer, 2015). Bien que cette explication soit attirante, il n’est pas évident que les expériences intersexes du genre puissent être transférées à d’autres groupes, étant donné la nature violente de leur assignation de genre et la pathologisation et la médicalisation constante qu’elles affrontent. En fait, un bon nombre d’enfants décrits comme ayant une hyperplasie congénitale des surrénales, condition invoquée en premier lieu tant par Baron-Cohen (Baron-Cohen et al., 2005; Knickmeyer et al., 2006b) que par les études sur le « transsexualisme », subissent le traumatisme de mutilations génitales et de traitements hormonaux non consentis après leur naissance pour normaliser leurs organes génitaux et leur profil hormonal. Aucun-e auteur-e ne rend compte de cette expérience, ni ne s’interroge sur ses effets potentiels sur l’identité de genre ou sur le développement de traits associés à l’autisme[2].

Il faut noter que les études citées plus haut arrivent à des résultats intéressants quant aux personnes trans adultes, mais ne nous informe aucunement sur le développement in utero. Au contraire, « [le transsexualisme] est caractérisé par une histoire endocrine prénatale/postnatale normale[3] » (Gooren, 2006:597), et aucune étude n’a montré de lien clair entre des variations hormonales in utero et les expériences trans, sauf parmi des populations intersexes (Berenbaum & Beltz, 2011; Saraswat, Weinand & Safer, 2015). Il est surprenant que cette hypothèse d’une cause hormonale du « transsexualisme », proposée il y a maintenant 20 ans (Zhou et al., 1995), soit tenue avec tant de confiance encore aujourd’hui (par exemple, Kranz et al., 2014) malgré l’absence d’études longitudinales tenant en compte les taux d’hormones prénataux effectifs, comme celles qui ont été effectuées par l’équipe de Simon Baron-Cohen (Auyeung et al., 2006, 2009; Chapman et al., 2006; Knickmeyer et al., 2005, 2006; Lutchmaya et al., 2002a, b). L’état de la recherche nous apprend bien peu sur le développement de l’identité de genre, au-delà de la conclusion peu renversante que les déterminants biologiques auraient des conséquences profondes, complexes et mal comprises sur le comportement humain.

Plusieurs auteurs ont aussi formulé des critiques à la théorie de Simon Baron-Cohen. D’abord, les études servant à appuyer son hypothèse centrale ont des lacunes méthodologiques majeures (Nashi et Grossi, 2007, Krahn et Fenton, 2012). De plus, selon Kristin Bumiller (2008:973), « l’explication de l’autisme de Baron-Cohen a le double effet de normaliser la condition (en suggérant qu’elle nous inclut tous) tout en essentialisant les différences de genre (en enracinant la condition dans la masculinité biologique[4] », éliminant ainsi la spécificité de la situation des personnes autistes tout en renforçant les stéréotypes de genre. D’ailleurs, les concepts de cerveau empathisant/systémisant sont fondés largement sur ces stéréotypes, et les questionnaires que Baron-Cohen utilise pour établir des scores d’empathie et de systémisation contiennent des questions fortement genrées (Jack, 2014). On pourrait aller plus loin : en soi, le diagnostic de l’autisme est genré, et les échantillons de populations diagnostiquées risquent toujours de reproduire les biais du processus diagnostique. Enfin, en établissant une causalité directe entre milieu hormonal, genre et autisme, Baron-Cohen efface toute la complexité du développement humain et les nombreuses interactions entre corps et environnement (Rogers 2010; Cheslack-Potlava et Jordan-Young, 2012). Ses recherches s’inscrivent parfaitement dans un projet déterministe qui omet complètement l’effet de la plasticité du cerveau et assoit les différences hommes/femmes dans la biologie afin de justifier le sexisme (Vidal, 2012).

Quoiqu’il en soit de la crédibilité ou de la pertinence de ces théories, force est de constater que les expériences trans et autistes sont posées comme contradictoires, du moins pour les femmes trans, si l’on combine la théorie du cerveau masculin extrême et les étiologies neurologiques des identités trans. Si ces deux explications devaient être valides dans leur champ respectif, comment expliquer la possibilité de femmes trans autistes ? Auraient-elles un cerveau masculin extrême ET un cerveau féminin ? Auraient-elles été exposées simultanément à des taux élevés ET faibles de testostérone ? Cela pose problème, étant donné que ces deux hypothèses sont fondées sur des démarches scientifiques très similaires et appuyées par les mêmes types de preuves. Or, non seulement les femmes trans autistes existent, mais leur nombre semble disproportionné. Dans une étude sur les patient-e-s d’une clinique de genre néerlandaise, de Vries et al. (2010) avaient déterminé que 6,4 % des enfants et 9,4 % des adolecent-e-s en consultation étaient autistes. De même, une étude de Strang et al. (2014) a déterminé que les personnes autistes étaient plus de 7 fois plus nombreuses à « vouloir être d’un autre sexe » que dans la population générale. Dans les deux études, la vaste majorité des personnes trans autistes étudiées avaient reçu une assignation masculine à la naissance. Certes, ces études méritent des critiques quant à leur méthodologie, fondées sur la pathologisation de l’autisme et des expériences trans et, dans le premier cas au moins, menées à partir d’un échantillon peu représentatif de personnes trans (les patient-e-s d’une clinique de genre). Toutefois, l’hypothèse qu’elles avancent, c’est-à-dire la coïncidence fréquente de l’autisme et d’un parcours trans, renforce l’impression générale que l’on peut se faire en fréquentant les communautés trans et les communautés autistes, ainsi que les observations de Jordynn Jack (2012, 2014) sur les expériences alternatives du genre chez les personnes autistes.

En somme, si tant de personnes trans, et notamment de femmes trans, sont autistes, comment tant de chercheur-e-s peuvent aussi facilement émettre des étiologies qui n’en tiennent pas compte ?

Personnes trans autistes dans la littérature médicale

Quoiqu’il en soit des causes de leur existence, des personnes trans autistes existent. Inévitablement confrontés à cette réalité, d’autres médecins cherchent donc d’autres façons d’expliquer la co-occurrence de ces expériences, et cette section analysera ainsi les explications qui sont amenées par des médecins et cherchera à mettre en évidence certains traits saillants des discours médicaux sur les personnes trans autistes, dans l’optique de recherches et de militances futures[5].

En menant une revue de littérature, j’ai pu repérer neuf articles, dont sept études de cas et deux articles de prévalence portant sur des autistes trans ou non conformes dans le genre :

1) de Vries, Annelou, Ilse Noens, Peggy Cohen-Kettenis, Ina van Berckelaer-Ohnes, Theo Doreleijers (2010). « Autism Spectrum Disorders in Gender Dysphoric Chidlren and Adolescents », Journal of Autism and Developomental Disorders 40, 930-936.

Étude qui cherche à établir la prévalence de l’autisme parmi les patient-e-s d’une clinique de genre destinée aux mineurs. L’article décrit aussi la situation des patient-e-s ayant participé à l’étude.

2) Strang, John, Lauren Kenworthy, Aleksandra Dominska, Jennifer Sokoloff, Laura Kenealy, Madison Berl, Karin Wlask, Edgardo Menvielle, Graciela Slesaranski-Poe, Kyung-Eun Kim, Caroline Luong Tran, Haley Meagher et Gregory Wallace (2014). « Increased Gender Variance in Autism Spectrum Disorders and Attention Deficit Hyperactivity Disorder », Archives of Sexual Behaviour 43, 1525-1533.

Étude qui cherche à établir la prévalence trans parmi des populations de personnes ayant des différences neurologiques, dont les troubles du spectre de l’autisme, mais incluant aussi le trouble de déficit d’attention et l’épilepsie.

3) Gallucci, Gerard, Florence Hackerman & Chester Schmidt (2005). « Gender Identity Disorder in an Adult Male with Asperger’s Syndrome », Sexuality and Disability 23 (1), 35-40.

Étude de cas sur une femme trans de 41 ans avec le syndrome d’Asperger.

4) Kraemer, Bernd, Aba Delsignore, Ronnie Gundelfinger, Ulrich Schnyder & Urs Hepp (2005). “Comorbidity of Asperger syndrome and gender identity disorder”, European Child & Adolescent Psychiatry 14 (5), 292-296.

Étude de cas portant sur un homme trans de 33 ans.

5) Landén, M., & P. Rasmussen (1997). “Gender identity disorder in a girl with autism – a case report”, European Child and Adolescent Psychiatry 6, 170-173.

Étude de cas portant sur un homme trans autiste de 14 ans.

6) Mukaddes, N. M. (2002). “Gender identity problems in autistic children”, Child: Care, Health & Development 28 (6), 529-532.

Les cas de deux enfants de 10 et de 7 ans, assignés garçons mais présentant des comportements féminins et ayant obtenu un diagnostic de trouble de l’identité de genre, suivi-e-s pendant 5 et 4 ans respectivement.

7) Perera, H., T. Gambandanathan & S. Weerasiri (2003). “Gender identity disorder presenting in a girl with Asperger’s syndrome and obsessive compulsive disorder”, Ceylon Medical Journal 48, 57-58.

Brève étude de cas sur un homme trans observé entre 14 et 22 ans avec des diagnostics de syndrome d’Asperger et de trouble obsessionnel compulsif.

8) Tateno, Masaru, Yukie Tateno & Toshikazu Saito (2008). “Comorbid childhood gender identity disorder in a boy with Asperger syndrome”, Psychiatry and Clinical Neuroscience 62, 238.

Brève lettre à l’éditeur décrivant un enfant avec le syndrome d’Asperger, assigné garçon, présentant des comportements féminins et ayant obtenu un diagnostic de trouble de l’identité de genre, observé-e entre 5 et 7 ans.

9) Williams, Patricia Gail, Anna-Mary Allard & Loonie Sears (1996). “Case Study: Cross-Gender Preoccupations in Two Male Children with Autism”, Journal of Autism and Developomental Disorders 26 (6), 635-642.

Étude de cas portant sur deux enfants de 3 et 5 ans assignés garçons et ayant des comportements féminins. L’article ne dit rien sur leur autoidentification et ne mentionne pas de diagnostic de trouble de l’identité de genre.

La plupart des articles traitent d’enfants, souvent assez jeunes, ce qui n’est pas surprenant étant donné la perception de l’autisme comme un problème lié à l’enfance et la rareté des ressources destinées aux adultes autistes. Il est intéressant de noter que les auteur-e-s de la plupart de ces études de cas n’en citent aucune autre (Williams et al., 1996, Landén et Rasmussen, 1997, Tateno, Tateno et Saito, 2008) ou en citent très peu (Mukkades, 2002, Perrera, 2003), indiquant que ces discours se sont donc développés en relative indépendance et qu’ils découlent d’attitudes au cœur de la profession médicale.

Avant tout, il faut émettre un commentaire important sur la valeur épistémique de ces études de cas. Contrairement à ce que permet l’approche de Jordynn Jack (2012, 2014), qui utilise des récits de personnes autistes avec des expériences non traditionnelles du genre, l’analyse de discours médicaux menée ici ne permet pas réellement de comprendre ce que vivent les personnes trans autistes. En effet, le regard clinique porté sur les personnes trans autistes ne donne qu’un accès indirect, incomplet et déformé de leurs expériences. Pour les récupérer, il faudrait utiliser des techniques particulières allant plus ou moins à l’encontre des documents. Je m’inspirerai ici en partie des réflexions issues des subaltern studies en histoire indienne postcoloniale sur les conséquences du projet colonialiste sur la production documentaire et historiographique (Guha, 1988; Spivak, 1988)[6]. Ici, plutôt que de subir le poids de l’impérialisme, du néo-féodalisme ou du patriarcat, les personnes trans autistes voient leurs actes d’affirmation invalidés par leurs positions comme objets cliniques (subordonnés à un regard médical), comme personnes autistes (subordonnées à un regard neurotypique), comme personnes trans (subordonnées à un regard cis) et, souvent, comme enfants (subordonnés à un regard adulte). Les études de cas constituent des documents qui, étant orientés vers les besoins de la profession médicale et alimentés par l’idéologie médicale, n’identifie les caractéristiques particulières des personnes trans autistes que lorsqu’elles posent problème pour un-e évaluateur-trice cis neurotypique, et méritent donc d’être rapportées comme cliniquement significatives : il s’agira de symptômes, de réactions au traitement, d’indices donnant des explications sur le lien entre genre et autisme ou de telle ou telle autre théorie « scientifique », etc. Quant aux personnes trans autistes elles-mêmes, elles sont entièrement effacées, avec leurs besoins, leur identité et leur compréhension propre de leur vécu et de leur expérience du genre, comme c’est d’ailleurs le cas pour les personnes trans en général (Namaste, 2000). En effet, comme nous le verrons, ce sont surtout les expériences trans des personnes autistes qui sont effacées par cette forme de violence épistémique. Largement effacées, les expériences des personnes ne sont disponibles que partiellement, en lisant entre les lignes des discours construits et élaborés par le regard médical. Paradoxalement, dans les études de cas sur les personnes trans autistes, la pathologisation des expériences trans rend inaccessible l’expérience qu’on affirme vouloir diffuser.

Il est aussi important de noter que tous les articles cités inscrivent les expériences trans sous le paradigme du « trouble de l’identité de genre » et désignent systématiquement les « patient.e.s » selon leur genre assigné à la naissance. Dans ce paradigme médical pathologisant, les expériences trans sont toujours vues comme une différence devant être éliminée par l’imposition de normes définies par des attentes cis : soit par l’acceptation du genre assigné à la naissance et l’élimination des comportements non conformes dans le genre, soit par une transition de genre suivant un parcours normatif et conçue comme un traitement.

Dans presque toutes les études de cas, la présence d’une condition autiste est utilisée pour invalider l’expérience de genre. Si certains articles reconnaissent la possibilité qu’une personne trans soit aussi autiste, l’occurrence conjointe des deux « troubles » est toujours vue avec une certaine suspicion. L’un des articles les plus respectueux en ce sens, celui de Landén et Rasmussen (1997), disqualifie l’idée que les caractéristiques trans se réduisent à l’autisme ou à un trouble obsessionnel compulsif et préconise de considérer que « le transsexualisme puisse être un trouble séparé de l’autisme et doive être géré en conséquence », mais considère néanmoins que l’autisme est un facteur de risque, sans spécifier pourquoi ni comment, comme si cela allait de soi. Un seul article ne semble pas voir l’autisme comme un obstacle à traiter les enfants trans autistes comme les autres enfants trans, mais seulement dans la mesure où ils peuvent s’exprimer verbalement – rien n’est dit sur les enfants autistes ne s’exprimant pas verbalement ou sur la possibilité d’exprimer une identité trans par d’autres formes de communication (Mukaddes, 2002).

En fait, il existe deux cas de figures principaux. Chez les personnes assignées filles à la naissance, l’autisme peut être perçu comme la cause fondamentale des affirmations identitaires ou des comportements masculins. Ainsi, Kraemer, Delsignore et Gundelfinger (2005) disent de leur patient, un homme trans de 35 ans avec le syndrome d’Asperger, que son profil concorde avec un cas de trouble de l’identité de genre, mais que « les résultats sont mis en doute par un trouble du spectre de l’autisme coexistant ». En effet,

« comme prévu pour un syndrome d’Asperger, nous avons remarqué une pensée logique surdéveloppée et l’accentuation d’habilités de logique abstraite, ainsi qu’un déséquilibre avec émotionalité basse et un haut niveau d’attributs instrumentaux et non émotionnels incluant activité [sic], absence d’émotionalité et de persévérance. Ces attributs sont généralement associés avec la masculinité et ont peut-être causé une conscience subjective d’être homme chez notre patiente. […] Le très haut niveau de masculinité peut être interprété comme un effet compensatoire additionnel pour accentuer le côté biologiquement masculin absent.

En tenant compte de ceci, nous pensons qu’avec le temps, notre patient a développé un trouble de l’identité de genre comme conséquence d’avoir adopté des traits émotionnels et cognitifs masculins à cause du syndrome d’Asperger[7] ». (Kraemer et al., 2005:295)

Ainsi, chez l’homme trans, l’expérience trans serait une conséquence de l’autisme, qui est positionné comme une expérience fondamentalement masculine. De fait, Kraemer et al. affirment que leur étude renforce la théorie du cerveau masculin extrême de Simon Baron-Cohen.

Cette explication n’est pas valide pour les femmes trans et les expériences transféminines. En particulier, les femmes trans autistes et les personnes autistes transféminines n’entrent pas si facilement dans ce schéma neurologique, et on ne peut assurément pas dire qu’elles ont un cerveau masculin extrême. Toutefois, leur expérience trans n’en est pas moins réduite à des conséquences de l’autisme, mais cette fois, en exploitant différents traits caractéristiques de l’autisme. En effet, dans une tribune libre adressée à la revue Psychiatry and Clinical Neurosciences, Tateno, Tateno et Saito (2008) concluent que « la plupart des symptômes liés au genre dans les troubles du spectre de l’autisme pourraient être liés aux caractéristiques comportementales et émotionnelles de l’autisme[8]. » Par exemple, Williams, Allard et Sears (1996 :641) affirment que les comportements et les intérêts féminins « peuvent être liés à un besoin d’expériences sensorielles qui sont, par hasard, majoritairement de nature féminine (objets soyeux, substances lumineuses et brillantes, le mouvement des cheveux longs, etc.)[9] », et peuvent aussi être typiques des intérêts particuliers que développent souvent les enfants autistes. Ils identifient aussi une théorie de l’esprit défaillante comme cause de la difficulté à s’affilier à leur genre assigné à la naissance. Similairement, Galluci, Hackerman et Schmidt (2005) qualifient la préoccupation de leur patiente adulte pour le genre et l’apparence physique féminine comme une obsession typique de l’autisme, voire comme le signe d’un trouble obsessionnel compulsif. Ils ajoutent que l’identité trans de sa patiente serait la conséquence des difficultés d’adaptation sociales découlant de son syndrome d’Asperger. Tateno, Tateno et Saito (2008) reprennent plusieurs de ces interprétations, mais ajoutent que l’expérience du harcèlement par des garçons pourrait mener à une identification féminine. De Vries et al. (2010:934) vont plus loin, affirmant qu’une adolescente trans autiste se serait convaincue « que son sentiment d’aliénation [causé par l’autisme] était expliqué par la dysphorie de genre. Il [sic] espérait que ses problèmes de communication seraient atténués par la prise d’œstrogène[10] » : ici, l’attribution de sa volonté de prendre des hormones à l’autisme semble avoir contribué à la décision de la clinique de lui refuser l’accès à la réassignation sexuelle, malgré son désir. Un article portant sur un homme trans recourt à des stratégies similaires pour expliquer les comportements trans, affirmant que l’identification masculine était la conséquence d’un trouble obsessionnel compulsif (Perera, Gambarnathan & Weerasiri, 2003). Dans l’ensemble, dans ces études de cas, être trans est placé dans le même registre que retirer les étiquettes des vêtements ou avoir une obsession pour les horaires de trains, deux comportements stéréotypés associés aux symptômes de l’autisme, et serait causé par les problèmes d’adaptation sociale des personnes trans.

Dans tous les cas, dans ces recherches, l’expérience trans est subordonnée à l’autisme, mais on peut constater un double standard. Alors que Kraemer et al. (2005) genrent l’autisme comme une condition masculinisante, suivant la direction donnée par Simon Baron-Cohen, les articles portant sur des femmes trans et les personnes transféminines éliminent entièrement le genre de l’autisme et font des expériences transféminines des conséquences accidentelles des symptômes de l’autisme. Pour les médecins rédigeant ces études de cas, l’autisme est l’explication centrale de tous les comportements décrits, dont l’affirmation d’une identité trans, qui, elle, ne peut pas être valide en soi.

Conclusion

Les deux types de discours médicaux étudiés (études étiologiques et descriptions cliniques) sont très différents dans leur traitement des personnes trans autistes et dans leurs conséquences sur elles. Néanmoins, le fait que tous émanent d’une perspective dominante cis et valide a des conséquences sur les personnes trans, sur les personnes autistes, et sur les personnes trans autistes.

1) Le fait que des chercheurs comme Simon Baron-Cohen puissent énoncer impunément des théories « scientifiques » qui rendent impossible l’existence des femmes trans autistes, pourtant très nombreuses, est symptomatique de la tendance à élaborer une compréhension cisnormative et masculinisante de l’autisme dont les femmes trans en particulier sont exclues. Cela s’ajoute aux dangers qui découlent de la masculinisation de l’autisme et la théorie du cerveau masculin extrême pour toutes les personnes autistes (Krahn & Fenton, 2012; Jack, 2014). L’autisme est largement stéréotypé comme une condition de jeunes garçons cis, ce qui nuit au processus diagnostic, à l’obtention de soutien, à la reconnaissance extérieure, etc., pour toutes les autres personnes autistes (adultes, filles, personnes trans, etc.).

De plus, il est extrêmement douteux que les études sur les causes de l’autisme ou des identités trans mènent à des améliorations des conditions de vie des personnes trans ou des personnes autistes. Au contraire, au moins pour les femmes trans, l’intériorisation des discours essentialisant produits par des médecins cis risque de contribuer à leur marginalisation et à leur exclusion du mouvement féministe. À titre d’exemple, lorsque Caitlyn Jenner s’est décrite comme ayant un cerveau féminin, Elinor Burkett (2015) a écrit une longue réponse pour le New York Times dans lequel elle utilisait l’essentialisme de Jenner pour en accuser le mouvement trans, bien que cet essentialisme provienne réellement de discours médicaux cis, et non des communautés trans.

2) La perception de l’autisme comme étant plus profond que l’identité de genre et comme causant le développement d’une identité trans accentue les violences dont sont victimes les personnes trans autistes. Les études de cas en laissent paraître quelques traces à travers le filtre de leur propre violence épistémique. À titre d’exemple, on peut deviner les traumatismes vécus par le patient de Perera et al. (2003), visiblement si peu respecté dans son identité qu’ils rapportent des cas de violence contre des gens qui voulaient « lui faire entendre raison », et c’est sans surprise qu’on lit que sa compliance[11] était faible étant donné que l’équipe a préféré lui donner des antipsychotiques (sans effet sur sa dysphorie, quoique ce qui est décrit comme un trouble obsessionnel compulsif se soit stabilisé) plutôt que de lui faciliter l’accès aux traitements d’hormonothérapie et aux chirurgies qu’il demandait. Également, combinée à la masculinisation de l’autisme, l’invalidation des expériences trans peut avoir un effet particulièrement redoutable sur les femmes trans, qui voient bien que le discours dominant rend incompatibles deux parties fondamentales de leur expérience : leur autisme et leur féminité (cf. le cas de Sleeping Chrysalid, dans Jack, 2012:5-6).

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Notes

[1] J’aimerais remercier Gabrielle Bouchard et Circé pour leurs commentaires et leur soutien. Cet article n’aurait pas été possible sans le soutien financier du CRSH et du FRQSC.

[2] Je tiens ici à remercier Janik Bastien Charlebois pour son travail acharné pour les droits intersexes. Son soutien et sa patience ont été fondamentaux pour ma compréhension des enjeux et des expériences intersexes.

[3] « transsexualism and homosexuality […] are characterized by a normal prenatal/postnatal endocrine history. »

[4] « Baron-Cohen’s explanation for autism has de twin effect of normalizing the condition (by suggesting it includes us all) while essentializing gender differences (by rooting the condition in biological maleness). »

[5] Lors de la rédaction de la première version de ce texte, présentée au 7e Congrès international des recherches féministes dans la Francophonie à Montréal en août 2015, je n’avais pas pris connaissance de la monographie de Jordynn Jack, qui avait déjà produit une étude similaire et obtenu des résultats très proches de la mienne. (Jack, 2014:202-206). Cependant, l’analyse présentée ici garde son utilité. D’abord, Jack ne cite pas certaines des études que j’analyse (spécifiquement, Perera et al., 2003; Strang et al., 2014), mais surtout, nos démarches sont différentes. En effet, Jack cherche à établir un contraste entre l’ambiguïté qu’elle perçoit dans la manière que les personnes et l’imposition d’un modèle binaire normatif dans les discours médicaux. Notre approche est plus résolument instruite par une perspective trans et cherche à reconnaître et à valoriser la voix des personnes trans telle qu’elle peut être perçue dans la production médicale. Jack, lorsqu’elle limite les expériences de genre autistes à l’expression d’une ambiguïté ou d’une non binarité, reproduit la même violence que les discours médicaux contre les personnes trans : il n’y a rien d’ambigu lorsqu’une femme trans de 41 ans affirme qu’elle est une femme (Galluci et al., 2005) ou lorsqu’un homme trans réclame hormones et « chirurgie de réassignation sexuelle » (Perrera et al., 2003).

[6] Étant historienne de formation, ma réflexion revient souvent à l’histoire.

[7] « As expected for AS, we noticed over-developed logical thinking and accentuation of logical-abstract abilities, as well as an imbalance of low emotionality and a high level of instrumental, non-emotional attributes including activity, lack of emotionality and perseverance. These characteristics are generally associated with masculinity and may have led to a subjective consciousness in our patient of being male. In this regard, primary cognition and perception in AS may be interpreted as masculine attributed and pave the way to the development of female-to-male GID. […] The extremely high level of masculinity can be interpreted as an additional compensatory effort to accentuate the biologically absent male side.

Taking this into account, we believe that, over the years, our patient has developed GID as a consequence of adopting male emotional and cognitive traits due to AS. »

[8] « Most of the gender-related symptoms in autistic spectrum disorders (ASD) could be related to behavioral and psychological characteristics of autism. »

[9] « This preoccupation may relate to a need for sensory input that happens to be predominantly feminine in nature (silky objects, bright and shiny substances, movement of long hair, etc.). »

[10] « … became convinced that this feeling of alienation was explained by gender dysphoria. He had the hope that his communication problems would alleviate by taking estrogens. »

[11] C’est-à-dire son observance des prescriptions thérapeutiques et son adhésion au plan de traitement suggéré.

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